Le jazz funky est apparu au milieu des années 1960 aux États-Unis dans la lignée du mouvement hard bop avant de se développer durant la décennie suivante. Toutefois, à l'origine, le jazz funky ou jazz-funk était assumé comme un style modernisé, interprété par des solistes au contact des chants évangéliques et des « blues lazy ». C'était pour eux une manière de jouer « soulful », c'est-à-dire de façon expressive et sentimentale.
Le terme argotique funky, signifiant littéralement « puant », mais que l'on peut comprendre comme « qui sent la sueur », est normalement une insulte traditionnellement adressée aux Noirs par les Anglo-Saxons blanc et protestant, mais qui, paradoxalement, sera reprise ensuite à leur compte par des artistes noirs tels que Horace Silver, l'un des pères fondateurs du style.
Issu principalement de la soul avec des structures harmoniques jazz, le jazz funky se caractérise par la prédominance de la section rythmique (piano, guitare, basse, batterie) qu'accompagne généralement plusieurs instruments à vent (trompette, saxophone...), ces derniers intervenant sporadiquement sur des ponctuations rythmiques (des riffs) ou bien pour dynamiser l'intervention d'un instrument soliste. Habituellement, le fond de cette musique est nettement « swinguante » avec des contretemps accentués.
Dans les années 1970, dans le prolongement du mouvement hard bop, le jazz-funk s'ouvre aux balbutiements de la musique électronique, du fait de l'intérêt porté essentiellement par des artistes comme Miles Davis, Eumir Deodato et Herbie Hancock, ce dernier apportant à ce style musical un ton clairement plus commercial et dont il est essentiel de retenir l'album Head Hunters (1973) du nom donné à son groupe. D'autres jazzmen se prêteront à l'exercice, comme les guitaristes George Benson et Grant Green.
Les titres sont couramment des instrumentaux et mêlent à la structure des morceaux de jazz – thème, succession de solos, thème – une instrumentation constituée de diverses percussions, d'une batterie et d'une basse électrique donnant naissance à des effets tels le slap, sans oublier un arsenal de claviers de toute nature et des cuivres.
Liste d'artistes représentatifs : Cannonbal Adderley, The Brecker brothers, Billy Cobham, Eumir Deodato, Lou Donaldson, Grant Green, Herbie Hancock, Eddie Henderson, Ramsey Lewis, Maceo Parker, Horace Silver et Grover Washington Jr.
Propulsée notamment par la rythmique de James Brown, instigateur du « pure funk », la musique funk est au carrefour du gospel, du rhythm and blues, de la soul, du blues et du rock. Elle synthétise l'histoire de la musique noire américaine du 20ᵉ siècle.
Dans les années 1960, les paroles insistent sur la défense des Noirs et la difficulté de vivre dans les ghettos. James Brown est dès lors considéré comme l'initiateur d'un funk urbain et revendicatif. À grand pas, le style prend forme et se consolide par l'apparition de formations telles que Sly and the Family Stone, The Meters ou Dyke and the Blazers et The Counts. L'instrumentation reste dépouillée, la rythmique trône sur un piédestal, tandis que le jeu y est débridé et foisonnant.
Le développement commercial du funk accompagne, à partir de la fin des années 1960, celui de la culture afro-américaine, à l'image de l'arrivée de la « blaxploitation » et de ses films destinés à la société des Noirs, comme Shaft avec une musique signée par Isaac Hayes. Le mouvement funk est encore boudé par une vaste majorité du public blanc américain, jusqu'à l'arrivée du courant disco dans la seconde moitié des années 1970. Cette musique créera un déclic, si bien que de nombreux groupes et artistes revendiqueront l'esprit du funk, chacun à leur manière.
L'immense public est finalement converti, boosté notamment par des groupes comme Commodores avec Lionel Richie et Chic, dopé par la guitare de Nile Rodgers et la basse de Bernard Edwards. Les succès s'enchaînent et le funk commence à se diversifier. Le mouvement disco-funk des années 1980 opère la fusion entre les rythmes disco et les cuivres caractéristiques du funk des périodes passées. À cette époque, il est difficile de faire l'impasse de groupes comme Earth, Wind & Fire et Kool & The Gang ou de chanteurs tels que Stevie Wonder et Michael Jackson (Off the Wall, en 1979).
Parallèlement au mouvement disco-funk, un autre style se déploie, prenant ses distances. Amorcé par le funk-rock de Sly and the Family Stone, un mouvement nommé P-Funk (pour Parliament-Funkadelic et Plush Funk) de George Clinton voit le jour, misant presque tout sur une rythmique qui groove à souhait. Leur message semble clair. Parliament, Funkadelic ou P-Funk Allstars, cherchent à libérer les humains des forces négatives d'un monde qui serait sans musique funk. Les formations sont à géométrie variable, mais toutes concèdent une place considérable aux expérimentations sonores et aux extravagances, drogues comprises.
À la fin des années 1970, le recours aux boîtes à rythmes, aux platines vinyle et aux dernières générations de synthétiseurs, marque la disparition des grands groupes « funky». La musique funk est alors à un tournant de son histoire. Les disques s'y rapportant sont alors triturés par des DJ bricoleurs comme Grandmaster Flash. Dès lors, le funk ne s'autoalimente plus de la même façon. Des groupes comme Trouble Funk, Sugarhill Gang et bien d'autres seront la base funky de la future révolution hip-hop, l'exemple type étant le titre Rapper's Delight de Sugarhill Gang avec sa ligne de basse samplée provenant du morceau Good Times, du groupe Chic. Même le pianiste de jazz Herbie Hancock ne fermera pas la porte et offrira son atout majeur à travers le morceau Rockit.
Les nouveaux instruments électroniques des années 1980 sont intronisés à la gloire d'un funk naissant. Des artistes, groupes et producteurs émergent, bien décidés à pourvoir un dialogue musical autrement différent et pour lequel le travail en studio définit une nouvelle forme de groove, mais sans toutefois perdre de vue le climat de la musique soul des années 1970. Cette mouvance, au côté du hip-hop, contribuera de manière décisive à l'évolution de la musique électronique.
De nos jours, la musique funk se distille dans d'autres styles plus qu'elle n'existe elle-même. Elle sert de porte-drapeau ou de carte d'identité que l'on retrouve en particulier dans les samples utilisés par certains artistes de rap. De même pour les producteurs hip-hop et R'n'B qui n'hésitent pas à puiser dans le catalogue des disques funk de l'époque pré-disco. Malgré tout, quelques artistes survivants des années 1960-1970 perpétuent encore les véritables sources du funk dans leurs compositions, suscitant ainsi l'intérêt des puristes du genre. Maceo Parker et Fred Wesley sont de ceux-là. N'omettons pas de mentionner Prince, l'un des rares à avoir repris le flambeau du funk tout au long de sa carrière et le groupe Jamiroquai, distillant son funk dynamique et mélangeant différents courants, notamment l'acid jazz, particulièrement proche du jazz-funk.
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